Noces de diamant de José et Raymond Peeters-Macherot

Noces de diamant de José et Raymond Peeters-Macherot

News
Samedi 17-10-2015

José et Raymond : un petit garçon flamand et une petite fille wallonne que la géographie séparait. Les mystérieuses et heureuses circonstances de la vie vont les réunir pour des dizaines d'années, un... siècle peut-être.

Une enfance mouvementée

La petite fille, c'est José Macherot. Elle habite rue Rouvreux à Wanzoul, au dessus du Roua : elle a toujours habité là. A 6 ans, elle connaît déjà la guerre et toutes les facettes, bonnes et moins bonnes, de la nature humaine ; pendant les bombardements, elle descend à la cave et se couche tête bêche avec sa sœur dans le pétrin transformé en lit tandis que sa tante prie. Armand, son papa, envoyé en Allemagne, parvient à s'échapper et revient à Wanzoul pour veiller sur sa jeune épouse ses petits enfants. La maman, Zoé n'hésite pas à affronter un soldat allemand qui vient voler le vélo familial.

En avance sur son temps

Cette période de vie marquera José. José sera toujours en avance sur son temps : féministe avant l'heure, à 13 ans, elle conduit la Jeep Willys de son papa au moment des moissons. Armand, qui est l'as du battage, doit aller de ferme en ferme avec les grosses machine à battre et José le suit avec les briquettes, les outils, et les bidons de mazout rangés dans « la charrette noire » accrochée à la jeep.

Bientôt comptable, José s'occupe très rapidement des factures de l'entreprise de son papa et va de ferme en ferme en vélo, à Bas-Oha, Lavoir, Boingt-Héron, récoltant l'argent. A 16 ans, il n'est pas rare qu'elle se balade à la tombée de la nuit avec plus de 40000 francs belges dans son porte-feuille.

A l'école, elle est étudiante Erasmus avant que que le concept ne soit inventé : par le biais d'un échange scolaire, elle va en Hollande peaufiner son néerlandais, mais surtout se rendre compte de l'avance de la ville sur la campagne : Rotterdam, c'est le chauffage central, le WC intérieur, la salle de bain alors que, dans son petit Wanzoul, l'eau de distribution est à peine installée...

Plus tard, après son mariage, elle fait de la politique. Et à la campagne en plus ! Une femme échevine à Vinalmont : une révolution, presqu'un scandale, une honte pour les hommes en tout cas, une première au niveau régional.

Echevine

En 1970, elle est donc élue au sein des « Intérêts communaux », haut la main. A 36 ans, elle est désignée échevine ; rien ne lui fait peur, ni le machisme, ni les violences verbales qui retombent bien vite : elle apaise, cherche le compromis au sein de son parti, avec le parti adverse. Ainsi, José, de la liste «Intérêts communaux », va chercher en voiture le socialiste Maurice Masset pour se rendre aux séances du conseil communal. Adversaire ? Non, complice surtout quand il s'agit de défendre Wanzoul contre la coalition des gens de Vinalmont qui veulent placer l'éclairage public dans le centre du village en oubliant les « faubourgs » du Roua ou de Wanzoul. De 1971 à 1976, c'est une législature, ce sont 6 années fastes avec notamment la mise en place du Foyer Culturel (dans les locaux devenus « salle Delbrouck », dans l'ancienne maison Lecocq ), la mixité de l'école, la nomination de Mmes Bellavoine, Duchesne et Vanval et aussi, des événements festifs : les 100 ans de Mme Elise Henquet au Pousserou ou la remise par José d'une médaille d'honneur à Marc Sohet, le cycliste vinalmontois, équipier d'Ocaňa, qui fait trembler et émeut tout le village pendant le Tour de France 1972.

Les années d'échevinat de José ont marqué la fin des conseils communaux à Vinalmont car, ensuite, ce sera la fusion des communes : «Ce n'était plus la même chose » et José abandonne la politique active.

Une ardeur d'avance

José garde toujours une ardeur d'avance, une volonté d'indépendance sans faille : à 81 ans, elle conduit sa voiture qu'elle gare sans problème dans le grand hangar entre les deux gigantesques et maladroites moissonneuses auxquelles on doit les seules grattes de sa Peugeot. Elle est aussi la première à s'inscrire aux tables de conversations en langues organisées par la commune de Wanze, elle qui est férue du Wallon « de chez nous ». Elle ne veut pas non plus prendre du retard au niveau informatique même si cela n'est pas sa tasse de thé. José nous dit: «Les inventions et les progrès de tout ordre ( les autoroutes, les grandes surfaces,la télévision, le nucléaire, les fusions, la concentration des services, l'informatique ) ont contribué à l'essor de la société mais en même temps à déshumaniser un peu celle-ci ».

Raymond

Raymond Peeters, son mari... depuis 60 ans, est né à Tildonk en 1931, à la ferme car ses parents sont fermiers.

Lui aussi a connu la guerre tout jeune: il a évacué avec toute sa famille : grands-parents, parents, tante, nièces, et ses 6 frères et soeurs. Le chariot de la ferme tiré par deux chevaux transporte sur les routes le ravitaillement, les plus âgés, le tout petit ou ceux qui sont fatigués.

La famille est donc nombreuse : la ferme de Tildonk puis celle d'Ophain-Bois-Seigneur Isaac ne sont pas grandes assez. En 1945, Raymond et sa famille viennent habiter à Wanzoul, suite à l'intervention de l' Évêque auprès du Baron... comme diront les gens du village (l'évêque, c'était en fait le curé de Noucelles dans le Brabant qui avait été aumônier dans le régiment du Baron Antoine de la Faille d'Huysse, époux de Marthe de Géradon, héritière du château et donc de la ferme de Wanzoul... la boucle est bouclée). Les Peeters gèrent donc la plus grosse des fermes de Wanzoul. Wanzoul, là où habite... José qu'il épouse en octobre 1955, il y a 60 ans...

A la ferme

Depuis tout petit, Raymond a su qu'il serait fermier : « Je ne trouve plus le chemin de l'école  ». Adieu l'école, vive veaux, vaches, cochons, couvées. Raymond vit l'évolution de l'agriculture : notamment les chevaux remplacés par les tracteurs, la batteuse du beau-père remplacée par les moissonneuses-batteuses, « ces engins de malheurs » comme disaient les anciens. A Wanzoul, Raymond et ses frères Charles et Robert, qui ont repris l'exploitation de la ferme à leur compte en 1956, vont de l'avant : ils sont récompensés, en 1965, au concours provincial d'amélioration de la qualité du lait et des produits dérivés ; la salle de traite avec une nouvelle laiterie de Wanzoul est mise à l'honneur ; cela marque aussi la fin définitive de l'époque de la traite des vaches à la main. En 1967, Raymond construit avec ses deux frères Charles et Robert une porcherie moderne rue Rouvreux, près d'où il habite avec José : élevage et engraissement sont au programme. Raymond est le spécialiste de la mise bas. Son travail, c'est sa passion, 24h /24.

La chasse est son hobby : avec son beau-frère Michel et son frère Robert, avec le fermier vinalmontois Constant Graindorge, il arpente les terres de Vinalmont, Schaltin, Oteppe, Héron. Ils poursuivent le gros gibier à Soye et dans les Ardennes.

Bonne-Ma et Bon-Pa

Mariés en octobre 1955, José et Raymond ont 3 enfants : Robert, Marie-Anne, Marie-France avec lesquels ils partagent leurs valeurs. Ils sont des mamy et papy gâteaux avec déjà un peu moins de rigueur pour les petits-enfants, qui font craquer Bonne-Ma et Bon-Pa : Sophie, Benoît, Damien, Guillaume, Marie-Pierre, Romain, Antoine.

Cette rigueur disparaît totalement avec les arrières petits-enfants, devant lesquels ils fondent.

I have a dream

60 ans, c'est vite passé. La vie à la ferme, la vie de famille occupent José et Raymond à temps plein.

La clé de leur bonheur tient sans doute au rêve de José :

« Je rêve que chacun retrouve, avec les contacts humains, cette spontanéité, cette chaleur humaine faites de compréhension mutuelle et intergénérationnelle, de complicité, de fidélité et d'amour. Il conviendrait de prendre le temps de se parler, de cultiver et d'apprécier les choses simples car aucune technologie, si performante soit-elle, ne remplacera jamais les sentiments »....